L’ÉMERGENCE ET LA NÉCESSITÉ DE RÉGLEMENTER LES CRYPTO-ACTIFS

PLAN

  1. Eléments introductifs

    Définitions importantes

    • -  Les crypto-actifs

    • -  La Blockchain

    • -  Les jetons digitaux

  2. La réglementation internationale des crypto-actifs : un devenir possible ?

    Le Comité de Stabilité financière et le Comité de Bâle.
    L’exemple moderne des réglementations japonaises

  3. La réglementation hésitante des crypto-actifs en France

  4. La réglementation florissante des crypto-actifs dans l’Union Européenne

    La réglementation européenne sur la “Blockchain”

    La réglementation européenne sur les crypto-actifs

    • -  Le TFR (Transfer of Funds Regulation)

    • -  La MiCA (Règlement sur les marchés des crypto-actifs)

      Les avancées de la MiFID et ses difficultés à s’intégrer

    •  

I. Éléments introductifs

Durant la crise sanitaire liée à la COVID 19, quand la plupart du monde était confiné chez soi, Beeple, un artiste digital américain a vendu une œuvre digitale à 69 millions de dollars. Cette œuvre fut vendue en tant que Non-fongible Token (NFT), jeton non-fongible en français. Cette vente à enclenché un certain renouveau de la crypto-monnaie, voir une course vers l’investissement en crypto-monnaies à l’international qui, avant cet événement n'était représenté que par le Bitcoin. Cet essor des crypto-monnaies, étant décentralisé du fait de la blockchain, est un phénomène qui semble nécessiter une réglementation car la numérisation des marchés a drastiquement changé le fonctionnement et la croissance des entreprises. Cette nécessité de réglementation semble avoir été renforcée par le “rug-pull” (tirage de tapis) opéré par la société FTX en fin 2022 qui à résulté en la perte de milliards de dollars en crypto-monnaies que des particuliers ont investi et confié à cette société.

Afin de réellement comprendre l’importance de ces nouvelles technologies, il est important de connaître les définitions qui entourent ce milieu.

Définitions importantes

Les crypto-actifs ou crypto-monnaies sont, selon l’AMF (Autorité des Marchés Financiers) des “actifs numériques virtuels qui reposent sur la technologie de la blockchain (chaîne de bloc) à travers un registre décentralisé et un protocole informatique crypté1.” Ce n’est néanmoins pas la seule définition. Celle du Parlement Européen n’est pas tout à fait la même, selon lui, “le terme «crypto-actifs» est utilisé pour désigner une grande variété d’actifs dématérialisée, parmi lesquels les monnaies et les jetons virtuels, mais exclut parfois certaines formes de crypto monnaies stables ou de jetons, tels que les jetons de sécurité ; considérant que les deux caractéristiques les plus communes des crypto-actifs sont 1) la nature non étatique du droit relatif à l’actif sous-jacent, à la créance ou au droit, et 2) l’utilisation de la cryptographie et de la technologie des registres distribués ou d’une technologie similaire pour procéder aux échanges et déterminer la valeur inhérente ou perçue de l’actif”2. Afin d'étayer la définition de crypto-actif, un avis du 9 janvier 2019 de l’Autorité européenne des marchés financiers (Amef) à la Commission sur l’offre initiale de jetons et les crypto-actifs donne cette définition : “un crypto-actif peut être considéré comme un actif dont la valeur perçue ou inhérente dépend principalement de la cryptographie et de la DLT ou d’une technologie similaire, qui n’est ni émis ni garanti par une banque centrale ou une autorité publique et qui peut être utilisé comme moyen d’échange ou à des fins d’investissement. (3) Certains crypto-actifs sont considérés comme des instruments financiers au sens de l’article 4, paragraphe 1, point 15), de la directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil. D’autres, en revanche, peuvent être considérés comme des dépôts au sens de l’article 2, paragraphe 1, point 3), de la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil. En raison des particularités liées à leurs aspects innovants et technologiques, il est nécessaire de définir clairement les exigences permettant d’identifier les crypto-actifs en tant qu’instrument financier. À cette fin, l’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) devrait être chargée par la Commission de publier des lignes directrices en vue de réduire l’insécurité juridique et d’assurer des conditions de concurrence équitables entre les opérateurs de marché”3. Cette définition bien qu'ayant de nombreuses précisions est tout de même limitée par la réalité politique, juridique et économique que représentent ces crypto-actifs.

Ces crypto-actifs et crypto-monnaies sont néanmoins issues d’une autre technologie - celle de la Blockchain. Il est intéressant d’invoquer la Blockchain, aussi appelée « chaîne de blocs », car c’est la technologie sous-jacente aux crypto-monnaies. La Blockchain, selon le ministère de l'Économie des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est en premier lieu, une technologie de stockage et de transmission d’informations. Cette technologie offre de hauts standards de transparence et de sécurité car elle fonctionne sans organe central de contrôle. Plus concrètement, la chaîne de blocs permet à ses utilisateurs - connectés en réseau- de partager des données sans intermédiaire.”4 Ce qui est novateur avec cet outil est sa décentralisation. En effet, la Blockchain est un outil informatique décentralisé, cela signifie que les clés afin d'obtenir une information sont détenues par plusieurs outils informatiques à travers le monde. Pour faire simple, la Blockchain est la technologie qui permet l’existence des crypto-monnaies. La Blockchain est une technologie de distribution de l’information de façon décentralisée, transparente et sécurisée qui peut avoir des applications dans de nombreux de domaines. Pour donner un exemple, la « Blockchain » peut être appliquée comme système de vote, en effet, elle permettrait d’assurer la transparence d’un scrutin tout en obtenant les résultats quasi instantanément.5

Enfin il faut comprendre ce que sont les jetons digitaux. “Les jetons digitaux dans l'univers cryptographique, un token (ou jeton) représente un élément qui possède de la valeur dans la blockchain. Cette définition est issue du livre Au cœur de la blockchain, édition Pearson.”6 Ces jetons peuvent avoir diverses utilités comme des permettre à des individus d'accéder au site internet ou encore accéder à des œuvres d’art ou des discussions privées, les possibilités sont nombreuses. On trouve par exemple des platform tokens, security tokens, utility tokens ou encore des jetons non-fongibles (NFT).

L’apparition, la multiplication et le caractère décentralisé de ces crypto-actifs les rend complexe à comprendre et par conséquent à les réglementer. C’est pour cela que nous faisons face à une réglementation mondiale fragmentée concernant ces nouvelles technologies.

Néanmoins, avec cet essor grandissant, il semble de plus en plus important de réglementer et encadrer ces nouvelles technologies, que ce soit au niveau national, régional ou encore international.

La question se pose de savoir si les crypto-actifs sont considérés comme des instruments financiers et comment ces derniers sont-ils régulés à travers le monde.

1 https://www.amf-france.org/fr/quest-ce-quune-cryptomonnaie

2 https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/A-9-2020-0161_FR.html
3 https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/A-9-2022-0052_FR.html
4 https://www.economie.gouv.fr/entreprises/blockchain-definition-avantage-utilisation-application#

5 https://www.presse-citron.net/crypto/faq/blockchain/

6 https://www.beaboss.fr/Definitions-Glossaire/Token-jeton- numerique-337487.htm#:~:text=Dans%20l'univers%20cryptographique%2C%20un,de%20la%20bloc kchain%2C%20%C3%A9dition%20Pearson.

II. La réglementation des crypto actifs au niveau international : un devenir possible ?

Au niveau international, il n’existe rien de concret. Néanmoins, un nouveau cadre international est en cours d’élaboration. Il est nécessaire d’évoquer le Comité de stabilité financière et le Comité de Bâle.

Le Comité de Stabilité financière et le Comité de Bâle

Le Comité de stabilité financière, créé en 2009, est un organisme international chargé de surveiller et de faire des recommandations concernant le système financier mondial. Pour ce faire, il coordonne les autorités financières nationales et les organismes internationaux d’établissement des normes à mesure qu’ils cherchent à développer des politiques rigoureuses en matière de réglementation, supervision et autres politiques du secteur financier. Le CSF a pour principal objectif d’assurer la stabilité du système financier à l’échelle mondiale.

Le Comité de Bâle a connu sa création en 1974 d’un Comité de régulation financière internationale dénommé « Comité de Bâle pour le contrôle bancaire », dont les réunions ont lieu au siège de la Banque des Règlements internationaux (BRI) à Bâle en Suisse. Ce comité a pour objectif principal d’assurer la stabilité du système financier à l’échelle mondiale.

Tout d’abord, le 1er accord de Bâle (1988), dit « Ratio Cooke », constitue un élément fondateur de la régulation bancaire. En effet, chaque risque doit comprendre un certain montant de fonds propres, permettant d’assurer la sécurité globale du marché et minimiser les risques de nature systémique. C’est une harmonisation des règles en matière d’exigence de capital (taux de capital de 8% fixé de manière uniforme à l’échelle internationale). Néanmoins, cet accord de 1988 a été jugé insuffisant.

Ensuite, Bâle 2 comprenant 3 piliers de la régulation bancaire. Le premier étant des exigences minimales de fonds propres, le deuxième une surveillance par les autorités de supervision et le troisième une transparence et discipline du marché.

Enfin, Bâle 3, venant répondre à la crise de 2007/2008 et 2010. Effectivement, ces années-là ont connu une crise financière, économique et de la dette souveraine. C’est ainsi que Bâle 3 est venu compléter les insuffisances de Bâle 2, notamment en renforçant le niveau et la qualité des fonds propres avec des exigences pour les banques systémiques et avec un encadrement du risque de liquidité.

Aujourd’hui, selon le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) français7, une réglementation des crypto-actifs coordonnée au niveau international est nécessaire pour ralentir le risque systémique potentiel. Aujourd’hui, les crypto actifs représentent un risque croissant pour la stabilité financière. C’est ainsi que deux projets sont justement en cours d’élaboration au niveau du Financial Stability Board et du Comité de Bâle.

Dans un rapport annuel de 2022, du Haut Conseil de stabilité financière a rappelé que la prochaine vague réglementaire devrait venir des organismes internationaux qui comprend le Comité de stabilité financière (CSF ou FSB en anglais) et le Comité de Bâle qui regroupe les gouverneurs de banque centrale et les superviseurs de 27 pays et établit les règles prudentielles du secteur.

Il est nécessaire aujourd’hui d’une réglementation coordonnée au niveau international. En effet, il relève un manque de données fiables et une croissance exponentielle des canaux de contagion du fait de l’intérêt croissant d’investisseurs traditionnels.

Le CSF a publié le 11 octobre 2022 une proposition de cadre réglementaire pour les crypto-actifs, l’idée est de rouler de la même façon la finance traditionnelle et les crypto actifs à partir du moment où les intermédiaires et les produits remplissent la même fonction.

Il est intéressant de citer le CSF « Les marchés de crypto-actifs évoluent rapidement et pourraient atteindre un point où ils représentent une menace pour la stabilité financière mondiale en raison de leur échelle, de vulnérabilités structurelles et d'interdépendances croissantes avec le système financier traditionnel. ». La technologie évolue plus vite que le savoir de l’homme. Le marché des crypto actifs représentant un risque réel.

Le Comité de Bâle quant à lui, sur le contrôle bancaire a ouvert le 30 juin 2022 une deuxième consultation sur ses propositions relatives au traitement prudentiel des crypto actifs pour les banques, dont la première version avait été diffusée en juin 2021. La proposition consisterait d’imposer aux banques exposées en crypto-actifs des exigences prudentielles, c'est-à-dire des exigences de sécurité qui regroupent des dispositifs légaux et éthiques.

Néanmoins, les mêmes remarques et demandes reviennent qu’au niveau européen, un cadre réglementaire qui ne soit pas trop restrictif pour les banques.

Cela n’est néanmoins pas le seul exemple international.

L’exemple moderne des réglementations japonaises

En 2021, le Japon a adopté une loi, qui entrera en vigueur en 2023, concernant la réglementation des crypto-monnaies. Cette loi mettra en avant un cadre juridique qui n'octroie la création de crypto-monnaies qu’aux banques agréées, sociétés fiduciaires ou organismes agréés. De plus, ce qui rend cette législation innovante est le fait que celle-ci n’autorise que la création de crypto-monnaies associé au yen. Cela permet au Japon d’avoir la mainmise sur cet outil.8 A l’autre bout du monde, il est possible d'apercevoir une réglementation tout à fait différente concernant les crypto-actifs.

La question se pose de savoir comment l’espace géographique européen, à l’échelle national et régional, s’adapte et réglementé cette effervescence des crypto-actifs.

III. La réglementation hésitante des crypto-actifs en France

Avant de rentrer dans le coeur des réglementations, il est intéressant de citer le HCSF, dans son rapport annuel de 2022, celui-ci surveille le risque systémique du secteur financier en France, il s’est ainsi penché sur le marché des crypto-actifs et il conclut que le secteur « ne semble pas représenter à ce stade un risque systémique, de par sa taille relativement limitée et des interconnexions faibles avec la finance traditionnelle ». Cela marque la réticence à une réglementation pointilleuse vis-à-vis des crypto-actifs.

En France, la réglementation des crypto-actifs n’est pas claire voir même quasi- inexistante. En effet, si l’on se repose sur le fait que ces crypto-actifs, en France, ne sont pas considérés comme des instruments financiers et que la seule monnaie en France est l’euro, conformément à l’article L111-1 du Code Monétaire et Financier, les crypto-actifs perdent alors grandement leurs valeur au sein de la finance française. Cela est accentué par le fait que le système français, en se basant sur les données de l’AMF, considère ces crypto-actifs comme des monnaies dans lesquelles l’investissement est soumis à des risques de fraude et d'escroquerie. Les crypto-actifs figurent même dans la liste noir de l’Autorité des Marché Financiers. Le site internet economie.gouv.fr donne une liste de ces risques :

“En investissant dans les crypto-actifs, vous pouvez notamment faire face aux risques :

  • ●  de bulle spéculative : le cours des crypto-monnaies est très volatil et expose les

    acheteurs à des pertes financières potentiellement très importantes

  • ●  de piratages informatiques (hacking) : la conservation des crypto-actifs n’offre

    aucune protection en matière de sécurité des avoirs

  • ●  de blanchiment des capitaux : par leur caractère anonyme, les crypto-actifs favorisent le contournement des règles relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux ou peuvent participer au financement du terrorisme ou d'activités criminelles.”9

    Ceci est paradoxal. Il y a d’un côté une peur de réglementer les crypto-actifs mais d’un autre côté, si une réglementation venait réguler ceux-ci, il faudrait une réglementation laxiste.

    Ainsi, dans un Rapport d’information de l’Assemblée nationale du 1 décembre 2021, il est notable que le marché des crypto-actifs n’a cessé de se développer. En termes de chiffre, en mai 2021, la capitalisation des actifs numériques a atteint 2 500 milliards de dollars, ce qui représente un niveau record plus de trois fois supérieur au pic de 800 milliards observé en janvier 2018.

Ensuite, un cadre législatif a été mis en place en 2019. En effet, entre 2016 et 2019, la France a entrepris de mettre en place un cadre juridique complet dédié aux technologies blockchain et aux actifs numériques. C’est ainsi que ces efforts se sont concrétisés avec les articles 85 et 86 de la Loi PACTE. Cette loi a aussi encadré les initial coin offerings (ICO) c'est-à-dire les émissions de jetons sur le marché primaire et les prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) sur le marché secondaire.

Néanmoins, aujourd’hui, les professionnels se rabattent essentiellement sur les règlements européens tels que le Règlement MiCA. En effet, la Loi Pacte, bien qu’elle réponde aux demandes des entreprises de la blockchain, ne satisfait qu'à moitié ces professionnels, ceux-ci dénoncent un manque de moyens pour obtenir des statuts ou encore des financements.

Par ailleurs, même si le cadre juridique est flou et en constante évolution, un professionnel, une entreprise peut légalement accepter ou refuser d’être rémunéré en crypto- monnaie.

L’Union européenne s'est également penchée sur la question et entame déjà penchée sur des possibilités de réglementation.

IV. La réglementation florissante des crypto-actifs dans l’Union Européenne

La réglementation européenne sur la « Blockchain »

Afin de réguler les crypto-actifs, il est nécessaire de se pencher sur la Blockchain. En termes de réglementation, la Commission européenne reconnaît l’importance de la sécurité juridique et d’un régime réglementaire clair dans les domaines liés aux applications fondées sur la chaîne de blocs. En effet, la Commission a adopté un ensemble complet de propositions législatives pour le règlement des crypto-actifs afin d'accroître les investissements et d’assurer la protection des consommateurs et des investisseurs.

La commission a fait une proposition de nouvelle législation de l’UE sur les crypto- actifs. Comme dit précédemment, les crypto-actifs éligibles en tant qu ‘« instruments financiers » en vertu de la Directive sur les marchés d’instruments financiers (DIRECTIVE 2014/65/EU OF THE EUROPEAN PARLIAMENT AND OF THE COUNCIL of 15 May 2014) étaient auparavant soumis à la législation de l’UE sur les marchés de valeurs mobilières.

C’est ainsi, que la Commission a proposé un régime pilote pour les infrastructures de marché (REGULATION OF THE EUROPEAN PARLIAMENT AND OF THE COUNCIL, 2020) afin d’éviter d’entraver l’innovation. Le régime pilote permet des dérogations aux règles existantes et permet aux régulateurs et aux entreprises de tester des solutions innovantes utilisant la chaîne de blocs.10

La réglementation des crypto-actifs dans l’Union Européenne

Les règlements européens TFR (Transfer of Funds Regulation) et MiCA (Règlement sur les marchés des crypto-actifs) vont révolutionner les crypto-actifs. En effet les deux règlements visent à établir un cadre réglementaire assuré et harmonisé afin de permettre au marché des crypto-monnaies de progresser. Ces réglementations vont également permettre de lutter contre les arnaques et les pratiques criminelles qui sont attachées aux crypto-actifs.

Le TFR, pris en juillet 2022, est le premier accord provisoire sur lequel se sont accordés les élus européen (Parlement Européen et Conseil de l’Union Européenne) concernant les crypto-actifs. Ce règlement vise à lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Il prévoit également des obligations conséquentes concernant l'identification des acteurs crypto ainsi que l’échange d’information entre eux. Cela, du côté de la crypto, ne semble pas être une avancée dans le bon car une des raisons de l’attractivité des crypto-monnaies et de la Blockchain est que le processus est anonyme. Seul le wallet (portefeuille digital) est identifiable.

Néanmoins, cet accord semble se baser une pratique déjà reconnue dans l’espace de la crypto et du business en ligne, celle du KYC (Know Your Client / Connaître son Client).

D’autre part, la MiCA soutiendra l’innovation tout en protégeant les consommateurs et l’intégrité des échanges de crypto-actifs. La proposition de règlement aurait pour objectif d’encadrer les acteurs du marché des crypto-monnaies. Ce qui est pertinent, c’est que cette proposition de règlement s’inscrit dans un contexte de régulation de la finance numérique.11

Le projet MiCA, acronyme pour Market in crypto assets, est une proposition de réglementation des crypto-actifs émise par la Commission Européenne datant du 22 septembre 2022 visant à préparer l’Union Européenne à l’air digital. Ce projet vise à “réglementer les stable coins autour de quatre points : la création d’une sécurité juridique grâce à un cadre légal, le soutien de l'innovation, la protection des consommateurs et la garantie de la stabilité financière12”. Ce projet “fait partie du train de mesures sur la finance numérique, lequel vise à libérer et à renforcer encore davantage le potentiel que la finance numérique peut offrir sur le plan de l’innovation et de la concurrence, tout en limitant les risques13.

Les avancées de la MiFID et ses difficultés à s’intégrer

La MiFID (Markets in Financial Instruments Directive) est une directive européenne rédigée en 2007 qui a pour but de rendre les marchés financiers plus efficaces et transparents mais surtout de protéger les investisseurs. Elle a permis de mettre fin au monopole des entreprises de marché ouvrant concurrence sur les marchés actions. Puis les règles ont été renforcées par MiFID II. L’institution de la MiFID II est un réel progrès pour les investisseurs, entrée en vigueur en janvier 2018. Concrètement pour les clients, la MiFID 2 a pour objectif de faire en sorte que l’intermédiaire financier vende le bon produit au bon client, et cela de la conception du produit jusqu’à sa distribution.

Malgré une belle avancée, l’institution de ses instruments reste un sujet très sensible, effectivement, les acteurs financiers ne sont pas tous prêts à appliquer les nouvelles règles édictées par MiFID 2 et les autorités de marché nationales ont fait savoir qu’elles seraient indulgentes avec les établissements qui auraient du mal à se conformer à la directive14.

Ainsi, la MiFID 2 apporte la transparence sur la tarification des actifs, en effet, à travers une norme « coûts et charges », MiFID 2 offre beaucoup plus de transparence en faveur des investisseurs. MiFID 2 replace l’investisseur au centre du jeu, en imposant une norme « market structure » (voir schéma ci-contre) pour davantage d’informations avant et après chaque transaction. « Market structure » permet de faciliter la compréhension des caractéristiques des divers marchés. Ce qui rejoint parfaitement le principe de transparence. Elle rend aussi les marchés plus efficients et plus accessibles, effectivement, elle garantit davantage de surveillance des marchés financiers et de contrôles sur les transactions notamment par exemple en intégrant les produits dérivés à fort effet de levier.

Mise en situation afin de bien comprendre l’intérêt de la MiFID II :
Vous contactez votre Banque pour qu’elle vous aide à investir. Elle devra apprendre à

vous connaître et sur la base de votre profil de risque et de vos objectifs vous proposez les produits les plus adéquats. Elle devra également vous informer des frais et des risques liés à ces produits. Et ainsi, vous fournir un rapport écrit résumant tous ces conseils d’investissement.

Face à cette multitude d’évolutions, il demeure un certain nombre de difficultés. Aujourd’hui, il serait question de faire évoluer la MiFID II, on parlerait de la MiFID III. Qu’en est-il du chemin vers la MiFID III 15?

Pour illustrer le propos, la FCA (Financial Conduct Authority du Royaume-Uni) a publié le 6 avril 2018, une déclaration demandant aux entreprises de demander l’autorisation de négocier des produits dérivés de crypto-monnaies. La note précise que le trading, les transactions et le conseil sur les dérivés de crypto-actifs sont des activités relevant de la « Directive sur les marchés d’instruments financiers II (MiFID 2) ». Ainsi, toutes les sociétés proposant des contrats à terme, des contrats de différences ou des options liées aux cryptomonnaies, sont tenues de se conformer aux lois applicables. En effet, la FCA a déclaré à ce sujet : « Les entreprises exerçant des activités réglementées dans le domaine des dérivés de cryptomonnaies doivent donc se conformer à toutes les règles applicables du FCA’s Handbook et à toutes les dispositions pertinentes de la réglementation de l’Union européenne directement applicables. ». Tout manquement constitue une infraction criminelle16.

La position de la FCA bien ancrée fait écho à celle de l’AMF, en effet, elle a énoncé son intention de sévir contre les entreprises non agrémentées proposant des dérivés de devises numériques. Dans un communiqué, l’AMF a indiqué qu’elle avait observé que des plateformes de trading lançaient des produits dérivés basés sur les cryptomonnaies tels que des contrats sur différence. L’agence, a indiqué que les contrats de cryptomonnaie réglés en trésorerie, tels que les contrats de différence17 ou les contrats à terme18, étaient qualifiés de dérivés. Dès lors, ils sont soumis au contrôle de l’AMF.

Seulement, il n’existe pas de définition de ce qu’est un produit dérivé financier, l’AMF a dû se livrer à un travail de définition. D’une part, il lui a fallu « qualifier juridiquement ce qu’il faut entendre par produit dérivé ». D’autre part, il lui faut poser des critères pour déterminer si une monnaie numérique peut être considérée comme un sous- jacent. Alors, l’autorité a déclaré dans un communiqué de presse qu’un « contrat sur cryptomonnaies se dénouant par un règlement en espèces » est un contrat financier. Par conséquent, les plateformes qui proposent de tels contrats doivent se conformer à la législation applicable aux instruments financiers.

L’AMF a présenté 3 options de régulation :

1. Promouvoir un guide de bonnes pratiques à droit constant ;
2. Etendre le champ des textes existants pour appréhender les ICO (Initial Coin Offering) comme des offres de titres financiers au public ;

3. Proposer une nouvelle législation, adaptée aux ICO.

C’est la troisième option qui a reçu le plus d’engouement.

Dernièrement, dans les communiqués de l’AMF, le 21 décembre 2022, celle-ci et l’ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution) mettent en garde le public contre les activités de plusieurs acteurs qui proposent en France des investissements sur le Forex (connu sous le nom de marché de changes, est un marché international de gré à gré, où les investisseurs échangent les paires de devises mondiales à un prix convenu à l’avance) et des produits dérivés sur crypto-actifs sans y être autorisés.19

Malgré les efforts fournis par l’Union Européenne et ses États Membres, il est possible de constater que la réglementation des crypto-actifs et de la Blockchain dispose encore d’une marge d’amélioration conséquente. Une approche homogène semble être la plus efficace.

 

7 https://www.usine-digitale.fr/article/regulation-des-crypto-actifs-un-nouveau-cadre-international-en- cours-d-elaboration.N2066327

8 Règlementation japonaise: https://siecledigital.fr/2022/06/06/japon-regulation-stablecoins/ #:~:text=La%20Chambre%20des%20conseillers%20du,f%20des%20stablecoins%20au%20Japon.

9 Site internet gouvernemental sur les crypto-actifs : https://www.economie.gouv.fr/particuliers/ cryptomonnaies- cryptoactifs#:~:text=En%20droit%20fran%C3%A7ais%2C%20les%20crypto,pour%20l'heure%20pas %20r%C3%A9glement%C3%A9es.

10 https://digital-strategy.ec.europa.eu/fr/policies/regulatory-framework-blockchain

11 https://digital-strategy.ec.europa.eu/fr/policies/regulatory-framework-blockchain

12 https:siecledigital.fr2022/06/06japonregulationstablecoins#:~:text=La%20Chambre%20des%20conse illers%20du%C3%A9mettre%20des%20stablecoins%20au%20Japon.

13 Proposition de RÈGLEMENT DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL sur les marchés de crypto-actifs, et modifiant la directive (UE) 2019/1937: https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/ TXT/HTML/?uri=CELEX:52020PC0593&from=FR

14 https://www.boursorama.com/patrimoine/actualites/mifid-ii-qu-est-ce-que-c-est-qu-est-ce-que-cela- change-pour-vous-f4a23c6748effb3a4edddb621fbd56de

15 https://www.dogfinance.com/fr/news/mifid-ii-revolution-ou-transition-vers-mifid-iii

16 https://journalducoin.com/defi/fca-derives-de-crypto-actifs-produits-financiers-soumis-a- autorisation/

17 https://fr.wikipedia.org/wiki/Contrat_de_diff%C3%A9rence
18 https://journalducoin.com/regulation/le-contrat-a-terme-chronique-juridique/

19 https://www.amf-france.org/fr/actualites-publications/communiques/communiques-de-lamf
 

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